Nicolas Blin

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Repères et éléments biographiques - extraits iconographiques

Antoine Emaz - PAYS- Le printemps des poètes - Cahors

Livre estampe - ima[in]e éditions

textes Antoine Emaz

 

 

PAYS

I.

bleu plein

sans nuance
égal uni lisse
plafond
ou panneau de bois bleu

 

ciel massif

air serré sec dur
compact
coque
un œuf bleu
rotonde coupole

 

et loin dessous
en bas
des hommes des arbres s’agitent
dans le vent de nord-ouest

 

PAYS -

Poème inédit d'Antoine Emaz - septembre 2017

Mise en image - Poème graphique de Nicolas Blin - janvier 2018

un livre-estampe numérique de 36 pages avec le texte en rabat.

numéroté et signé par les auteurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DES SIGNES SUR DU PAPIER

La poésie est partout et nulle part : elle paraît marginale, peu lue, mais on qualifie très souvent de « poétique » un film, un spectacle de danse, une mise en scène de théâtre, une musique… un peu comme si la poésie était douée d’une élasticité qui la rendait capable d’innerver les autres arts. Mais son rapport à la peinture est particulier, peut-être parce qu’il s’agit dans les deux cas, somme toute, de signes tracés sur une surface. Certains poètes peuvent être peintres (Hugo, Michaux, Titus-Carmel…) , mais le plus souvent la relation peintre/poète passe par le livre comme lieu commun du poème et du travail plastique. On pense aux œuvres des poètes et peintres surréalistes, à Reverdy et Picasso, Braque, Juan Gris…, à André du Bouchet et Giacommetti, Bram van Velde, Tal-Coat…, Dupin et Miro, Tapiès… Bonnefoy et Alechinsky, Hollan… Notre époque ne fait que poursuivre cette tradition de compagnonnage, de rencontre entre le langage des mots et celui des lignes et des couleurs. Les éditeurs attachés à ce dialogue entre poètes et peintres sont assez nombreux, mais pas forcément connus : Fata Morgana, Unes, AEncrages, Centrifuges, Faï fioc, Atelier des Grames, Tarabuste, Méridianes, Pasnic, L’Atelier Contemporain… Plus fréquemment encore, le peintre (plus rarement le poète) crée une collection de livres en parallèle à son travail plastique : La Canopée, A travers, FMA, Anne Slacik, Le livre pauvre, La petite fabrique … Avec Imag(in)e, Nicolas Blin se place dans cette mouvance, ou milieu, biotope ; c’est un petit monde, mais extrêmement divers et vivant. Pour ma part, j’ai toujours aimé travailler dans ces parages, sans doute par frustration de n’être pas peintre, mais aussi pour la liberté étonnante que cela permet vis-à-vis du livre. Les mots bougent peu, mais l’artiste renouvelle à chaque fois l’espace dans lequel ils parlent, résonnent, et c’est toujours une surprise, très souvent une joie : ainsi pour Fuie, ou pour Pays.

Il y a sans doute chez Nicolas Blin une pente littéraire ; il se définit lui-même comme un « plasticien narrateur ». Autrement dit sa peinture vise aussi une histoire, ou s’articule à un récit, ou construit une « narration ». Je me souviens, il y a longtemps, d’une série de toiles à partir de l’univers ou imaginaire romanesque d’Henri Bosco. D’une autre façon, dans mes poèmes, il y a une part narrative, même minimale, très loin d’une intrigue au sens du roman ; si bref soit-il, le poème a une durée, il dit un moment de vie, il déplie le temps d’une émotion, et non d’une action, si l’on veut marquer la différence avec le temps romanesque. Le séquençage du poème par les blancs sur la page ou la numérotation pour les parties indiquent cette durée interne, ce trajet intérieur d’un point à un autre, d’un état initial à un état final, même lorsque le poème peut sembler avancer par boucles, reprises, vagues successives. Les panneaux réalisés par Nicolas Blin pour Prises de calme peuvent apparaître alors comme des images proches de celles d’un film qui serait constitué d’arrêts, de pauses, et c’est le regard du spectateur qui reconstituerait le mouvement, le continu d’une durée.

De la même façon, pour Fuie et Pays, le peintre parle bien de « mise en image », de « poème graphique », à propos de son travail ; autrement dit, le texte reste support mais pour une création plastique autonome, qui vaut en soi ; il ne s’agit pas d’illustrer au sens de calquer, représenter, reproduire visuellement l’écrit, mais de produire une « image » qui, dans sa propre grammaire plastique va à la rencontre de ce que porte le poème. Car celui-ci n’impose pas un sens, il traduit plutôt une expérience et une interrogation : pour Fuie, sur l’absence et la perte, pour Pays, sur l’espace, le paysage.

Au bout le livre, image et texte, fixe le trajet d’un moment de vie qui est aussi une question sans réponse, peut-être parce qu’il n’y en a pas.

Antoine Emaz

février 2018

 

 

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